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Marie Baronnet: Sur le sentier de la tornade

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Moore, Oklahoma, mai 2013
Une tornade sur le sentier de la guerre

Le 20 mai une tornade classée EF5 sur une échelle de 1 à 5 touche terre près d’Oklahoma City et pendant 40 minutes va aspirer et ventiler tout sur son passage. C’est un tourbillon monstre de plus de 2 km de diamètre au sol à sa puissance maximum, avec des vents chronométrés à 340 km/h. En à peine plus d’une demie heure 27 km de dévastation quasi totale.
Mal assurée sur les débris je vois un paysage atomisé. Soufflé. Les arbres n’ont plus de feuilles, les troncs sont sablés à vif de leur écorce. Ceux qui sont encore debout. Il n’y a plus d’oiseaux. Et tout ce que l’homme a planté là et accumulé, maisons, voitures, panneaux, meubles, jouets, intérieurs intimes, photos, a été lancé en l’air et est retombé dans un nouvel arrangement insolite, collage imprévu et calme. Verdun. Le monstre est remonté au ciel et je marche dans la trace qu’il a laissée.
Ici et là au milieu des décombres les humains se reconnaissent des débris, ils bougent et s’animent, mal assurés eux aussi, comme s’ils venaient de débarquer sur ce sol que pourtant ils connaissaient si bien. Rien n’est à sa place, ou ce qu’il était.
Les voix portent dans ce silence, parfois soulevées par le vent. Je m’approche et suis accueillie avec chaleur par des visages souriants et fatigués, chacun encore dans sa surprise et déjà à trier. La communauté des gravats.
«  Mais entrez donc ». Ni porte ni portail. Ni mur, ni maison. Dans mon lopin hétéroclite. « Home, sweet home ». Le rêve américain sans dessus dessous. Comme ses politiques, les dirigeants du coin, en majorité républicains, il y a une semaine votaient non aux fonds publics alloués à la FEMA, cet organisme d’état qui intervient d’urgence en cas de catastrophes naturelles… et dont les ajusteurs sont déjà sur le terrain.
Toute ruine a ses trésors. Les photos. Rien n’éclaire plus ces visages qu’une photo retrouvée, comme si au fond, rien n’était plus important.
Maison de paille, maison de bois, maison de brique, le monstre n’a pas fait la différence et il a tout soufflé.
Il est passé par ici… Il repassera par là.

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