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Shanghai : Les Bad girls

Preview

Lorsque j’ai vu les Bad Girls pour la première fois, en 1988, ce genre de « créatures » n’existait officiellement pas en Chine. Et c’est sous un pseudonyme que certaines furent publiées, en France, dans un magazine comme Lui qui apparaissait déjà largement rétro face à l’apparition d’une pornographie de plus en plus hard.

J’ai aimé dès le premier instant ces « mauvaises filles » — qui ne sont pas toutes, des filles — dans ce qu’elles avaient de beauté vénéneuse, d’identité à la fois douce et troublante, d’évidence de personnages de fiction, de littérature et parce qu’elles semblaient bien souvent échappées d’un tableau. Elles étaient des cousines aux yeux bridés et à la peau soyeuse des héroïnes de Balthus et elles étaient avant tout elles-mêmes, en représentation devant le photographe pour assumer leur propre rôle ou celui qu’il leur assignait.

Vingt ans plus tard, ces filles n’ont pas pris une ride et elles me touchent toujours aussi directement : elles restent aussi mystérieuses et coquines qu’au premier jour, semblent s’offrir et se donner et se dérobent plus que jamais. Filles de papier et de lumière aux vêtements soigneusement choisis ou ôtés, elles s’affirment mais n’en disent jamais assez pour que nous les cernions : elles restent images, mais, heureusement, des images qui pourraient ne pas être sages au sens où l’entend le dicton. Vraiment sages, en fait, parce qu’elles s’assument, avec un courage qui n’avait alors que celui du photographe, pour affirmer corps et désir, sensualité et élégance faite de peu mais toujours magnifiée par un sens du geste, du port, de l’abandon mêlé de fermeté du corps.

Ces mauvaises filles ont quelque chose d’éternel, de non daté. Elles deviennent immédiatement des figures emblématiques d’une idée de la féminité qui dialogue avec les promesses de l’érotisme. Elles se donnent à voir avec un malin plaisir et se dissimulent suffisamment pour éveiller le désir, sinon la concupiscence. Effeuiller leurs noms, égrener leurs différences, se heurter à leur singularité, c’est comme parcourir des mondes qui se croisent sans jamais vraiment se rencontrer.

Entre les images en noir et blanc, si caractéristiques de l’approche directe et subtile de Zhang explorant son réel immédiat de l’époque et les compositions plus picturales en couleur se tisse un monde mental traversé de beautés. Des beautés trompeuses d’une certaine manière, car elles sont avant tout illusion photographique, portrait qui se refuse et se donne, évidence et frustration, dépendance au réel et absence de matérialité.

C’est peut-être tout cela qui m’a, spontanément, fait aimer ces « mauvaises filles », qui en devenaient soudainement excellentes. C’est en tout cas ce qui fait que je les aime toujours, de façon, peut-être, plus lucide.

EXPOSITION
Portraits de nus
Jusqu’au 15 avril 2014
Beaugeste Photo Gallery
Shangai

http://www.beaugeste-gallery.com 

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