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Henri Bureau

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Ses amis l’appelaient « nounours ». Henri Bureau est mort avant-hier. Bon vivant, impétueux, flamboyant, grande gueule, on cherchait toujours l’origine de cette faille qui laissait transpirer chez lui toutes ses angoisses et tous ses excès. Mais Henri, avant tout, c’était un grand photographe, un de cette génération d’après-guerre, qui ne vivait et ne pensait que pour la photographie. Il a été un témoin privilégié des années 60, 70 et 80. Il y a deux ans, pour la sortie de son livre et son exposition Bouclage une vie de reporter, son ami Michel Philippot avait réuni quelques témoignages. Nous les republions aujourd’hui.

Henri Bureau était un photographe qui pouvait passer dix heures dans un avion de ligne pour faire 1 minute de photos. Il était également capable d’affréter un DC3 (Dakota) au raz du désert du Tibesti pendant plusieurs semaines pour tenter d’aller à la rencontre de Françoise Claustre (je connais très bien le pilote qui ma raconté cette histoire inouïe…). Nous sommes devenus des amis…
Dominique Aubert

Henri Bureau, un fuseau horaire vivant.
Bernard Bisson

En 2008, l’AFP m’a envoyé couvrir avec 44 autres de mes collègues les JO de Pékin. Mes premiers jeux, ma première fois en Chine, la première fois que l’AFP envoie autant de photographes. Je dois couvrir la natation, l’un des deux gros morceaux des JO avec l’athlétisme. Donc inutile de te dire que je suis très excité. Sur place, les horaires sont infernaux, la concurrence aiguisée, mais les résultats sont là et le bonheur au rendez-vous. Bref, je m’éclate, c’est une mission qui compte dans ma carrière. Si mes souvenirs sont bons, je crois que de violentes manifestations éclatent en Grèce au même moment. Comme souvent, je lui téléphone pour donner des nouvelles. Après les : « Oh mon grand fils ! », « Oui, ici il fait beau ! » d’usage, papa, qui n’a jamais perdu de sa curiosité journalistique, me lance un nonchalant : « Tu as vu ce qui passe en Grèce ? Grosse histoire ! », d’un air de dire : « Si tu étais un bon journaliste, tu serais au courant, tu serais déjà là-bas et je devrais déjà voir tes photos dans les journaux !! » Oubliant le décalage horaire qui le sépare de moi, du prix exorbitant de la communication, le ton est méprisant et montre une certaine déception de sa part. Je m’en sortirai en lui répondant : « Tu sais papa, je suis sur les Jeux olympiques… »  Réponse: « Ah oui…OUI bon, t’as intérêt à être bon, je te surveille ».
Martin Bureau

Lorsque Henri Bureau est arrivé à Gamma comme rédacteur en chef, il était pour moi comme la statue du commandeur, impressionnant et intimidant, et j’étais peu habitué au news international. Mais un jour, alors qu’il cherchait un photographe pour partir d’urgence en Jordanie, j’ai dû être le seul à avoir un passeport sur moi, et je suis parti. C’était un mois après le débarquement des Américains en Arabie Saoudite. J’ai couvert la première guerre du golfe jusqu’à la libération de Koweit-City, mais Henri, qui était venu passer quelques jours sur place pour coordonner le rapatriement des films des différents photographes de Gamma, avait pris ses boîtiers et n’aurait pas rechigné, s’il en avait  eu l’occasion, à nous faire un scoop en passant… Cette adrénaline-là ne meurt jamais.
Gilles Bassignac

Jeune novice des années 70 faisant mes premiers pas à Fleet Street, la Mecque de la presse anglaise, mon régime consistait, entre autres, à dévorer des magazines à la recherche des belles photographies pour apprendre. De temps en temps, je tombais sur celles signées Henri Bureau. Des photographies d’actualité très impressionnantes qui faisaient partie de ma collection de « maîtres » de la profession. Ce n’était que trente ans plus tard, autour d’une bouteille de rouge à Perpignan, que j’ai fait la connaissance de « l’ours gentil », Monsieur Bureau lui-même, à la retraite bien méritée.
Derek Hudson

Henri est pour moi le reporter photographe « instinctif » par excellence : une force de réaction rapide à lui tout seul, un flair sur les événements d’actualité avec la logistique qui va avec et, au bout, « la plaque ».
Jacques Langevin

La veille de l’arrivée du pape Jean-Paul II à Lisieux en juin 1980. Repérages… Dialogue. Henri Bureau : Tout est calme ici, ma sœur ? – Oh oui, monsieur l’inspecteur, très calme comme toujours ! H B : Très bien ma sœur, combien de chambres ici ? – Nous sommes nombreuses et nombreux. H B : Ah ,il y a aussi des hommes.Bien sûr, il y a des prêtres. HB : Nous allons vérifier. Un étage plus haut, Henri ouvre une porte . HB : Bonjour mon père, que lisez vous ? – Mais un livre saint, monsieur l’inspecteur ! H B : Ah, j’y compte bien… Merci – Au revoir monsieur l’Inspecteur… Les trois photographes Sygma redescendent (Henri Bureau, James Andanson et Philippe Ledru). Ils n’ont pas trouvé de chambres bien situées pour une série photos exclusives…
Philippe Ledru

Septembre 1980, samedi ou dimanche soir… tard. Suis convoqué au labo par Hubert Henrotte: « Bureau rentre du conflit Iran-Irak, premières images, c’est urgentissime. » Henri donne deux films, un Tri-X et un Enta. Le boss attend, loupe à la main. L’une après l’autre, il passe en revue une grosse poignée de photos.. Toutes montrent la même image (deux panaches de fumée, un militaire de dos tenant une AK 47, le tout sur un ciel bleu), Hubert grogne, les balaie de la main puis rentre dans une énorme colère, noms d’oiseaux et plus encore sont échangés avec Henri qui conclut en partant : « Hubert, regarde bien cette image, elle va faire le tour du monde ! »
Thierry Orban

Henri , c’est le rédacteur en chef qui était capable de vous engueuler parce que le reportage que vous aviez envoyé à la rédaction ne lui plaisait pas . « Retournes-y, et maintenant que la situation a évolué, tu vas trouver des situations plus fortes », m’a-t-il dit sur un ton qui ne supportait pas la discussion. J’y suis retourné vite mais un peu meurtri, pour finalement 4 pages dans Paris Match et une double dans VSD la semaine suivante. Cela a largement pansé mon amour-propre.
Pascal Parrot

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