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Jumièges : Jean Gaumy

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La nature semble avoir des formes si insaisissables qu’aucun inventaire de son spectacle ne se ressemble. Celui de Jean Gaumy, irrévoquablement nommé D’après nature, tend vers l’abstraction et nous permet de la voir en plusieurs temps. Il révele tout d’abord des lignes, des matières et des motifs si prononcés qu’ils prennent la forme de falaises, banquises, cascades, montagnes, chemins et forêts seulement après un temps d’observation. Parfois même, on ne peut pas leur donner de nom — ou l’on ne veut pas les associer à une description réductrice pour garder intact le sentiment de l’insaisissable, mystique, qui nourrit le sublime. Jean Gaumy a passé des années à révéler sa fascination pour la nature à travers la mer, la pleine mer, en photographie et en film, et appréhende ici la terre dans toute sa magestralité. L’esthétique calme qu’il y associe contraste avec les vagues agitées de ses premières fascinations, et les hommes ont disparu des images.

Le paysage de Gaumy est souvent noir et blanc — atemporel, ou presque, dans la lenteur avec laquelle il évolue dans son environnement naturel. Si la neige fond chaque année et que la glace du pôle Nord se réduit à un rythme dangereusement visible, les strates des pré-Alpes italiennes ont été creusées par des années dont les milliers sont palpables dans ces denses compositions. Au vertige du temps s’ajoute celui de la perspective, troublante, des paysages figés en deux dimensions. Les falaises raides deviennent des surfaces aussi horizontales que la banquise, les arbres sont des ratures à l’encre de chine, ceux qui sont enneigés forment des constellations aux mille étoiles. « Des traces empilées du chaos d’avant que l’homme n’arrive sur terre pour y voir des formes », écrit Alain Bergala, commissaire de l’exposition.

Tout est la, dans la nature à l’état brut, il suffit de prendre le temps de regarder. Jean Gaumy est aussi réalisateur, et l’exposition est dirigée par le spécialiste de Jean-Luc Godard qui a fait les grandes pages des Cahiers du Cinéma. Il n’empêche, il s’agit ici de rendre un hommage à la nature grâce à la fixité inhérente à la photographie, en inspirant la même immobilité au spectateur. En arrêtant le défilement d’images que la nature déploie dans sa constance, Gaumy dévoile au spectateur les différents paysages contenus dans un cadre si modestement étroit et impose l’émerveillement — silencieux, comme ses photographies. « L’acte de création ne se réduit pas à l’instant de la prise. Il y faut aussi le temps lentement distillé du passage de l’image captée à l’image montrée », conclut Bergala, pour confirmer l’invitation.

 

EXPOSITION
Jean Gaumy. La tentation du paysage
Du 29 mai au 21 septembre 2014
Logis abbatial de l’abbaye de Jumièges
24, rue Guillaume-le-Conquérant
76480 Jumièges
France
T : +33 (0)2 35 37 24 02

http://www.abbayedejumieges.fr
http://www.magnumphotos.com/JeanGaumy

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