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Nashville : Le Pouvoir des Images, premiers films et photos soviétiques

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Depuis les œuvres de l’avant-garde constructiviste d’Alexander Rodchenko et d’El Lissitzky jusqu’aux photos modernistes d’Arkady Shaikhet et de Max Penson, les photographes soviétiques ont joué un rôle crucial dans l’histoire de la photographie moderne. « The Power of Pictures : Early Soviet Photography and Film » (« Le Pouvoir des Images : premiers films et photos soviétiques ») analyse la façon dont la photo, le cinéma et l’art de l’affiche ont été mis à profit pour diffuser l’idéologie communiste. L’exposition revisite ce moment historique, pendant lequel les artistes ont joué un rôle moteur dans le changement social et l’engagement politique radical. Couvrant une période allant de la révolution bolchévique de 1917 jusqu’aux années 1930, elle explore la façon dont les premiers films et photos modernistes ont influencé un nouveau style soviétique, tout en dynamisant et développant ces deux médias. A travers 181 œuvres, « The Power of Pictures » montre comment les images frappantes des maîtres de la photo et du cinéma ont été considérées au début de l’Union Soviétique comme de puissants outils de propagande, envisageant la photo et le cinéma comme des médias influents et formellement apparentés.

Nancy McCrary : Pourquoi teniez-vous tant à monter cette exposition au Frist à l’époque ?  

Katie Delmez : Susan Edwards, notre directrice, est une historienne de la photo, spécialiste de la photographie américaine des années 1930, dont une grande partie avait également un objectif politique. Le thème de « Power of Pictures » s’accorde donc parfaitement à ses connaissances, mais elle avait aussi conscience que l’idée que la photo puisse être utilisée comme un outil de communication était susceptible de parler à tout le monde, dans une société où nous devons digérer chaque jour une grande quantité d’images. En tant que commissaire ayant travaillé sur l’exposition pour le Frist Center tout au long de l’année dernière, je me suis moi-même passionnée pour ces croisements entre art et politique et pour la diversité des styles développés avant les mesures autoritaires de Staline quant à l’expression créative. En dehors de ce contexte, les photos et les films montrés restent visuellement surprenants. L’exposition offre l’occasion rare de voir un grand nombre de ces œuvres réunies en un seul endroit.

NM : On a beaucoup critiqué les artistes qui ont produit des photos et des films promouvant la propagande russe. Quel était selon vous leur objectif lorsqu’ils ont créé ces œuvres ? 

KD : Beaucoup d’artistes soutenaient à l’origine le nouveau gouvernement. Ils voulaient aider à la diffusion de son idéologie. Un grand nombre avait même combattu dans l’Armée Rouge pendant la Guerre Civile. On le sait, et c’est d’ailleurs pour cette raison que le Musée Juif a souhaité organiser cette exposition : la majorité des photojournalistes en activité à l’époque étaient juifs. En tant que membres d’une minorité persécutée par les règles tsaristes, ils ont soutenu l’Union Soviétique, parce qu’elle promettait un monde égalitaire. Ils se sentaient libérés de l’antisémitisme au sein de cette nouvelle profession. De nombreux artistes et écrivains ont finalement été déçus par Staline, mais ils ont dû accomplir sa volonté de créer une nouvelle rhétorique visuelle et mise en scène, à la gloire de l’état et de ses accomplissements, qui présentait une vie soviétique idéalisée.

NM : Dans une démocratie, la propagande se cache t-elle parfois sous le masque de la publicité, ou est-elle aussi manifeste que ce que nous voyons dans cette exposition ? 

KD : Le phénomène n’est pas nouveau, ni uniquement rattaché à l’Union soviétique. L’art est utilisé pour transmettre des messages politiques depuis l’Antiquité, qu’il s’agisse d’une personne spécifique ou d’une cause particulière (quelques exemples rapides : les sculptures représentant Jules César ; La Liberté guidant le peuple, de Delacroix ; les photos de la vie dans les appartements newyorkais par Jacob Riis ; et même les fameuses toiles de Norman Rockwell, qui incitaient à l’achat d’obligations de guerre pendant la Seconde Guerre Mondiale). Je pense pour ma part que les publicités promeuvent souvent plus que l’objet auxquelles elles sont rattachées : quelqu’un, un mode de vie, et par extension, une culture au sens large, ainsi que le système économique sur lequel elle se  fonde.

Article publié dans le magazine South x Southeast ©sxsemagazine.com

EXPOSITION
The Power of Pictures: Early Soviet Photography and Film
Du 11 mars au 4 juillet 2016
Frist Center for the Visual Arts
919 Broadway
Nashville TN 37203
Etats-Unis
http://fristcenter.org

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