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Xiao Quan, Faces of Our Time

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La nouvelle série inédite de Xiao Quan composée de 54 tirages nous frappe tant par sa fraîcheur que par l’énergie qu’elle dégage. Pourtant, le genre du portrait est déjà bien encombré de maîtres comme Annie Leibovitz, Richard Avedon, ou David Bailey. Pris dans leur ensemble, les portraits de gens ordinaires réalisés par Xiao Quan présentent une telle cohérence qui fait penser à Auguste Sander (1876-1964). C’est une coïncidence que le titre de cette exposition Faces of Our Time évoque une Antliz der Zeit de Sander. Le maître qui a produit en 60 ans un « face book » monumental de la société allemande, qu’il appelle d’ailleurs « les Hommes du XXe siècle ». Père spirituel de la photographie de portrait, Sander a été le premier à classer soigneusement ses dizaines de milliers de portraits par groupes sociaux-professionnels, avec une prédilection pour les paysans. De même, Xiao Quan a tenté de saisir la diversité et la vitalité de la société chinoise contemporaine.

Bien qu’ils n’ont pas été conçus pour cela, ces nouveaux portraits de Xiao Quan contrastent de Notre Génération, qui se compose principalement de portraits d’artistes chinois, poètes et écrivains, réalisateurs et musiciens des années 1980 et 1990. Les nouveaux portraits ont commencé en 2012, lorsque Xiao Quan a reçu une invitation pour participer à une campagne bénévole pour l’ONU intitulée « 2032: L’avenir que nous voulons. » Deux-cent trente-deux citoyens ont été invités à répondre à la même question devant les caméras du réalisateur Du Jiayi et du photographe Xiao Quan : « Quel monde souhaiteriez-vous voir dans vingt ans ? »

Fort de cette expérience avec l’ONU, Xiao Quan est plus à l’aise pour photographier les gens ordinaires, cette fois pour un projet immobilier à Kunming (Yunnan). Cette fois, il se sépare carrément de l’approche objective et neutre d’August Sander. Allant au-delà du visage et de l’identité, ses nouveaux portraits se lisent comme des poèmes et exaltent la grâce, la pose et l’attitude de ses sujets. Ils expriment des sentiments et leurs humeurs, ce que Cartier-Bresson appelait « le silence intérieur ». Les portraits de Xiao Quan partagent cette rare capacité à exprimer une « musique intérieure ». Pour paraphraser Cartier-Bresson, il m’explique qu’à la place du « Moment Décisif » il essaie de saisir le « sentiment décisif ». Ce qui lui importe, ce sont les sentiments.

Du portrait du nain Monsieur Guo se dégage de sa pose aristocratique une impression de noblesse, un caractère quasi royal comme dans les tableaux de Velasquez. Le portrait d’un libraire, sur la tête duquel Xiao Quan a posé un livre ouvert, établit un état de sensation complexe avec des interprétations-miroirs. Ce livre n’est pas n’importe quel livre, c’est Cent ans de solitude de Gabriel Garcia Marquez. Sur la couverture du livre, on peut voir le portrait de Marquez lui-même portant sur sa tête son propre livre. Voilà le talent de Xiao Quan pour le portrait : le sens classique de la poésie, la musique intérieure qui est en même temps ce silence intérieur que lui-même poursuit.

« La chose la plus difficile pour moi, c’est un portrait. C’est très difficile. C’est un point d’interrogation que vous mettez sur quelqu’un comme pour dire, qui est-ce, de quoi s’agit-il, quelle est la signification de ce visage ? Et la différence entre un portrait et un instantané, c’est que le portrait, c’est une personne qui a accepté d’être photographiée. Ce n’est pas du tout comme quelqu’un que vous voyez, que vous attrapez comme cela, dans la rue. »

« Le Moment Décisif » – Photographies et paroles d’Henri Cartier-Bresson (1973)

Jean Loh

Xiao Quan, Faces of Our Time

http://www.beaugeste-gallery.com/xiaoquan/en-xq1.html

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