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David S. Allee, Chasing Firefly

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La série de David S. Allee, Chasing Firefly (À la chasse aux lucioles), exposée à la Morgan Lehman Gallery de New York, porte bien son nom. Le photographe y crée des images à la façon du chasseur d’insecte lumineux du titre – par une errance luxuriante, se mouvant dans l’obscurité en quête de lumière. A l’image d’un divertissement enfantin, l’œuvre d’Allee s’avère quelque peu sentimentale, mais indéniablement magique.

Les photos de nuit les plus électriques présentées à la galerie, qui utilisent largement les lumières artificielles à disposition pour montrer des scènes de nuit, me font penser à Silent Night (Nuit silencieuse), de Markus Henttonen, série qui a recours au même type de lumière pour saisir un monde sombre – dans ce cas, des maisons décorées pour Noël à Los Angeles. L’effet est ici toutefois plus angoissant qu’enchanteur, créant une impression de tension et d’inquiétude qui émanent du silence.

L’esthétique chez Allee est souvent surréaliste, mais l’impact général reste ambigu. Understanding (Compréhension) montre dans sa moitié inférieure un mur délabré, surplombé par l’insigne au néon pivotante de l’artiste Martin Creed, qui se trouvait alors au bord de l’East River, sur laquelle est inscrit le terme “Understanding”. Photographiées avec un temps de pose long, les lettres se déploient dans une forme rouge rayonnante, qui complique peut-être le sens déjà obscur de l’inspiration de Creed. Allee tire également profit du mouvement dans Wind Along the River (Vent le long de la rivière), qui montre un arbre isolé dont les branches feuillues balayées par le vent sont floutées, prenant des allures surnaturelles et fantasques.

Le passé d’Allee dans la planification environnementale et urbaine apparaît nettement dans son œuvre, qui prend régulièrement les constructions pour sujet. Sa série de 2006 Cross Lands (« Terres franchies ») est celle qui se rapproche le plus de Chasing Firefly, avec ses paysages nocturnes peuplés de structures fabriquées par l’homme.

Comme l’indique le communiqué de presse de la galerie, les lieux montrés dans Chasing Firefly ont été choisis parce qu’ils renvoient au passé d’Allee à New York et dans le Berkshire. Leur sens autonome restera toutefois un mystère pour les visiteurs. Les titres qui évoquent le plus littéralement l’expérience de l’artiste dans ces lieux peuvent ainsi s’avérer utiles. Sans contextualisation, certaines photos peuvent laisser de marbre. Une photo montrant le grand magasin Saperstein, peut par exemple passer pour une image promotionnelle. Riverside Salt (Sel au bord de l’eau) a peut-être une signification particulière pour le photographe, mais semble banale au profane, le site industriel qu’elle montre n’étant pas spécialement photogénique. Practice Field Below (Champ d’entrainement en-dessous) montre un pont surplombant le champ du titre. Il n’y a personne, et aucun signe n’indique une présence passée, ce qui laisse une impression d’austérité.

D’autres photos évoquent toutefois de façon plus évidente des souvenirs d’enfance, enveloppant le spectateur dans la chaleur, si non dans l’étreinte éclairante, de la nostalgie. Dans Fireworks (Feux d’artifices), un petit groupe d’individus sont assis sur des couvertures et des chaises pliantes sur une pelouse en pente. Nous supposons qu’ils sont en train de regarder un spectacle pyrotechnique, même s’il n’apparaît pas sur la photo. Ceux qui ont grandi dans un milieu rural ou suburbain reconnaîtront immédiatement la scène, qui me rappelle les soirs d’été pleins de leurs puissantes associations sensorielles et émotionnelles. Ball Court (Terrain) montre un terrain de baseball vieilli, dont la surface écaillée témoigne des milliers de parties qui ont dû y être jouées. Dans Long Building (Bâtiment long), les lumières d’une voiture se déploient en traînées oranges et rouges, tandis qu’au-dessus, des fenêtres semblent s’étendre à l’infini.

Ma photo préférée reste Swimming Area (Zone de nage) qui se distingue des autres puisqu’elle est la seule à ne pas utiliser de lumière artificielle. Elle a été prise à l’aube et le communiqué de presse indique que c’est à cet endroit qu’Allee a appris à nager. On imagine aisément le jeune Allee, il y a quelques années, jouant là-bas, peut-être en camp de vacances, ou pendant une sortie familiale. La sensation de temps et de souvenir est ici palpable, ce qui en fait de la photo la plus sincèrement émouvante de l’ensemble.

Jordan G. Teicher

Jordan G. Teicher est un journaliste américain et critique basé à Brooklyn, à New York.

 

David S. Allee, Chasing Firefly
Du 5 janvier au 11 février 2017
Morgan Lehman Gallery
534 w 24th St
New York, NY 10011
USA

www.morganlehmangallery.com

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