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Clive Arrowsmith : « Si je n’étais pas photographe, je serais moine bouddhiste »

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Clive Arrowsmith est photographe à Londres. Après avoir étudié la peinture et le design en école d’art, il a débuté la photographie alors qu’il travaillait comme graphiste à la télévision. Puis, délaissant le petit écran pour travailler en tant que photographe dans les années 70, il a rapidement reçu des commandes de la part de grands magazines de mode, notamment des couvertures pour Vogue version France et UK, Harper’s Bazaar, The Sunday Times, Vanity Fair et Esquire. Clive Arrowsmith a continué à travailler dans cette veine, à la fois pour les publications et pour la publicité, mais il est tout aussi connu pour ses portraits de musiciens et autres célébrités – Paul McCartney et les Wings, Mick Jagger, George Harrison, Art Garfunkel, Def Leppard, le prince Charles, Michael Caine, Damien Hirst, pour en citer quelques-uns. Arrowsmith est l’un des deux seuls photographes à avoir pris les clichés du calendrier Pirelli deux années de suite.

Qu’est-ce qui vous a poussé vers la photographie, et pour quelle raison y restez-vous fidèle ?

Après mon école d’art, j’ai été peintre pendant trois ans, influencé par la Renaissance italienne, sa clarté, la manière dont la lumière étreignait les silhouettes dans les œuvres de De Vinci et du Caravage. Puis j’ai découvert l’appareil photo 10×8 en devenant directeur artistique par nécessité, pour avoir un travail alimentaire. Il me fallait trois mois pour faire un tableau, alors que l’appareil photo capturait l’instant avec une minutie exquise. Très vite ce médium m’a captivé et c’est devenu une passion qui ne s’est jamais éteinte depuis.

Est-ce qu’il vous est arrivé de regarder le travail d’autres photographes ou artistes pour trouver l’inspiration ou pour apprendre ? Est-ce que cela vous arrive encore ?

Je ne m’étais jamais beaucoup intéressé à la photographie avant de la découvrir en tant que directeur artistique, et ensuite c’est devenu une obsession. Je me souviens de Grace Coddington de Vogue UK (elle est maintenant éditrice mode de Vogue US) me disant que mon travail lui évoquait un mélange de Penn et d’Avedon. Je ne connaissais même pas leurs magnifiques photos avant que Grace ne me les montre. J’ai été stupéfait. Je voulais quitter le Royaume-Uni sur-le-champ pour étudier auprès d’eux à New York, mais Vogue me commandait des travaux sans discontinuer. Je photographiais les collections parisiennes pour Vogue France. Je faisais des voyages dans le monde entier pour les défilés, si bien que je n’ai jamais eu le temps de devenir assistant d’un mentor en photographie. Je me suis formé en autodidacte. Le fait d’être jeté dans le grand bain tout de suite en fournissant des photos de mode pour Vogue UK m’a obligé à faire mes propres expériences au fur et à mesure.

Après l’école d’art, vous avez brièvement travaillé pour la télévision puis vous avez commencé à prendre des photos pour des magazines comme Vogue, Vanity Fair et Esquire, et ces travaux ont lancé votre carrière de photographe. Pouvez-vous nous raconter comment vous avez obtenu ces commissions ?

J’ai commencé à travailler pour tous ces magazines alors que j’étais toujours directeur artistique. Je faisais des illustrations pour un magazine britannique appelé Town (l’équivalent d’Esquire). Mais avant qu’Esquire n’arrive en Angleterre, je regardais déjà le monde à travers mon objectif. J’ai supplié le directeur artistique de Town de me laisser diriger une séance de photos et il m’a laissé à contrecœur photographier le défilé de mode du Royal College of Art, et ce fut un grand succès. Par la suite, j’ai commencé à travailler pour un magazine de mode innovant, appelé Nova, puis pour Harper’s Bazaar, Vogue, et ainsi de suite, au fil des décennies. J’ai fait deux calendriers Pirelli d’affilée, ce qui a été donné à peu de photographes.

Combien de temps consacrez-vous habituellement à un shooting, et quels sont votre environnement et votre type d’interaction de prédilection ? Est-ce que vous préférez connaître le modèle à l’avance ?

J’essaie de respecter le temps imparti, jusqu’à ce que j’obtienne ce que je veux, puis une fois que j’ai saisi cet instant, je reprends le même procédé jusqu’à avoir l’image que je souhaite. Je procède ainsi à plusieurs reprises, et chaque fois je découvre quelque chose de nouveau sur le sujet, jusqu’à ce que le modèle ou le magazine m’arrache à mon appareil. Évidemment à mes yeux ce n’est jamais parfait, ça s’approche seulement le plus possible de ce que je veux. Si c’est un portrait, je dois connaître la personne, la voir en photo, pour avoir une idée de l’architecture de son visage. Cela me donne une référence mentale pour envisager la manière de l’éclairer.

Qu’est-ce que vous préférez dans les campagnes publicitaires ?

Ce qu’il y a de bien dans les grosses campagnes commerciales, ce sont les moyens financiers, qui permettent d’avoir des mannequins ou des sujets exceptionnels. Un appareil photo, c’est juste un photocopieur qui enregistre l’instant. Dans les grandes campagnes commerciales, par exemple les calendriers Pirelli, on a des lieux fantastiques, des mannequins magnifiques, et tout le temps pour les photographier. C’est un vrai plaisir de travailler pour ce genre de commande.

Comment conceptualisez-vous les portraits de célébrités ?

Si la personne est d’accord de partir sur une de mes idées, c’est super, mais la plupart du temps je trouve qu’avec le visage et un fond neutre, j’ai ce qu’il me faut. Le visage est une vraie carte des expressions et du temps qui passe. Au fil de ma carrière, je me suis rendu compte que l’appareil photo est une machine à voyager dans le temps qui préserve des moments uniques.

En quoi vos idées sont-elles différentes de celles d’autres photographes de mode ?

Ça, c’est à d’autres de le dire, je ne peux pas répondre. Lorsque j’ai commencé à prendre des photos, je désirais trouver mon propre style. Et à mesure que j’ai progressé, l’aspect de mon travail s’est affiné. Parfois des gens me disent : « J’ai vu une photo l’autre jour et j’ai su tout de suite qu’elle était de toi. »

Est-ce que vous utilisez d’autres médiums que la photographie ?

Comme je l’ai dit, j’ai été peintre et j’ai suivi des cours aux beaux-arts pendant six ans, donc cette influence sera toujours présente. Je suis passionné par la direction artistique et la direction de film, d’autres branches du même arbre, dans lesquelles il y a également le son et la musique, médiums que j’adore.

Si vous n’étiez pas photographe, que seriez-vous ?

Un moine bouddhiste, mais je n’ai pas assez de volonté pour ça, du coup je me tournerais de nouveau vers la peinture.

 

Cet entretien fait partie d’une série d’interviews organisées par la Holden Luntz Gallery, située à Palm Beach en Floride.

Propos recueillis par Sara Tasini.

Holden Luntz Gallery
332 Worth Ave
Palm Beach, FL 33480
États-Unis

http://www.holdenluntz.com/

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